La chapelle Gosin
Ce qui me plaît le plus dans mon travail « C’est que me soient donnés les murs blancs d’une chapelle perdue dans la campagne. Il faut marcher pour y arriver, longtemps, dans la boue. L’extérieur est modeste, dénudé. Je peux m’y asseoir des heures durant, y penser pendant des mois et, alors, commencer à couvrir ces murs de tout un monde, y insérer ceux que j’aide et mes plus beaux souvenirs, comme pour les perpétuer et les garder à portée de main. Après les murs, il y aura le plafond et puis tel autre coin encore, et la chapelle se remplira.
Elle n’aura souvent, au cours de l’année, d’autres visiteurs que les pinsons et le vent sous la porte, peu importe : il me suffira de savoir qu’autour de Notre-Dame, tout est rassemblé ».
Max van der Linden
Aujourd’hui la chapelle est visitée par de très nombreux pèlerins, de tous âges, tant francophones que néerlandophones, qui viennent parfois de loin et trouvent paix et sérénité dans ce lieu à l’écart de notre monde agité et dur.
Autour de la Vierge, Max a créé tout un univers de méditation illlustrant entre autres la présence de Marie dans la passion de Jésus et racontant la vie toute simple des habitants de son village qui se retrouvent encore aujourd’hui en ce lieu tant pour la fête que pour le deuil.
Bernadette
45 x 40 cm
La jeune voyante de Lourdes arrive au couvent de Nevers où on a cru bon de la cloîtrer.
On lui a fait revêtir sa robe de toile, son châle et son bonnet pour raconter ses visions aux soeurs réunies autour d’elle. C’est la dernière fois qu’elle peut en parler avant d’entrer dans l’anonymat du couvent.
Elle revit le rêve de ses Pyrénées et de l’apparition inoubliable.
A l’évêque qui lui demandera : « Que va-t-on faire de vous mon enfant ? », elle répondra : » Je ne suis bonne à rien, Monseigneur ! »
Elle a pourtant mis en route des millions de gens s’en venant à Lourdes en quête d’espérance.
Max van der Linden
Le jeune homme riche
105 x 160 cm
Dans une architecture imaginée par François Terlinden, voici représentés mes amis d’il y a vingt ans. Pierre Delfosse regarde les étoiles, c’est un savant. Bruno a le nez dans son moteur, Arlette est mannequin, Jean-Pierre est plongé dans ses bouquins de chimie, Roger est électricien . Ils sont tous là, occupés à leur activité favorite.
A la « porte de service », comme on dit dans les châteaux, voici le Seigneur qui invite le jeune homme riche, propriétaire du lieu. Il l’invite à le suivre mais le garçon fait un geste d’impuissance. Il ne peut répondre à l’appel : « Vous comprenez, Seigneur, je donne un grand cocktail, j’ai acheté une Alfa-Roméo, j’ai formé une chorale, je dirige un orchestre, j’apprends la chimie, il y a les jolies filles et tout le reste. Je voudrais bien vous suivre mais… ».
« Le Seigneur le regarda et se prit à l’aimer. Le jeune homme partit tout triste car il avait de grands biens. » (Evangile de St Luc, chap.18)
Max van der Linden
Actus tragicus
120 x 90 cm
Cette céramique est inspirée par la cantate 106 de Jean-Sébastien Bach, chorégraphiée par Maurice Béjart.
Cette cantate est, à mon humble avis, une des plus belles oeuvres jamais réalisées sur le thème de la mort.
J’ai voulu évoquer l’homme mourant élevé par musiciens et danseurs vers la Jérusalem céleste (qui est en fait la ville de Weimar où la cantate fut créée).
Max van der Linden
La rue des Brasseurs à Namur
75 x 150 cm
Au bord de la Sambre, un superbe ensemble de maisons anciennes. J’y ai placé un couple, lui est noir et elle est de race blanche. Leur amour est critiqué, menacé, la mort rôde par là. Mais ces obstacles ne font sans doute que les rapprocher davantage.
Max van der Linden
Antonio Vivaldi, le prêtre roux
160 x 120 cm
Venise…la basilique St Marc, les églises, les palais et le carnaval qui durait six mois. Vivaldi enseignait la musique à « l’Hospice de la Piété ». Les jeunes filles abandonnées qui y étaient recueillies étaient cloîtrées derrière des grilles. Leurs concerts étaient réputés dans toute l’Europe.
Sous le violoncelle, les quatre saisons, en gondole.
Au centre, la mort de Vivaldi : en 1741, il s’en alla mourir dans un faubourg de Vienne, déçu, appauvri, presqu’oublié déjà. J’ai imaginé ce vieux musicien qui avait été célébré à Venise comme un triomphateur, demandant à la religieuse qui veillait seule ses derniers moments : « Ma soeur, mettez-moi mon étole, je suis prêtre ». J’ai intitulé cette céramique « L’Etole ».
Max van der Linden
A Sang-Do et Shantoki
80 x 50 cm
« Si nous allions nous promener dans les bois de la guerre
où ne repoussent plus les feuilles,
nous passerait vite l’envie de faire de beaux discours,
et vous, les Présidents,
si vous aviez un fils qui ne revenait pas,
peut-être votre coeur froid souffrirait-il d’engelures.
Derrière le paravent et le bourdonnement de vos beaux discours
préparés sur les plages de quelque Floride
dans le dolce farniente du soir,
est-ce la mort ou quelque démon qui tire les cartes ?
L’homme fait hara-kiri.
On tue pour apprendre à vivre.
C’est une ancienne nouvelle méthode d’éducation,
la terre est le zoning industriel de la haine
avec comme corollaire une vallée de larmes pour trois cent mille ans.
L’enfant a eu la jambe coupée et sa mère a été tuée.
Il l’appelle tant qu’il peut.
Personne ne vient faire repousser cette jambe perdue, aujourd’hui et toujours, une béquille de bambou lui servira de mère.
Ça se passait quelque part en Asie, quelque part en Afrique,
Quelque part, quelque part ».
Julos Beaucarne
Le Pays noir
80 x 50 c
Dans un ensemble d’usines et de maisons désaffectées
où les murs sont noirs et les carreaux brisés,
un enfant a semé son petit jardin.
Un air de flûte monte dans ce paysage désolé,
quelque chose, peut-être, va reprendre vie.
J’ai eu la chance de me voir commander cette oeuvre par un vieux
mineur pensionné :
« Vous comprenez, Monsieur, c’est toute ma vie, j’ai passé quarante ans dans le fond ».
Max van der Linden
Les disciples d’Emmaüs
110 x 60 cm
Deux jeunes gens quittent le monde d’aujourd’hui.
Cheminant dans le silence du désert,
ils rencontrent quelqu’un et lui demandent
« Reste avec nous ».
Max van der Linden
L’orchestre
50 x 115 cm
Ils étaient musiciens.
On les a emprisonnés dans l’horreur d’un camp de concentration.
On les oblige à jouer du Mozart pendant l’exécution de l’un de leurs frères.
Mais dans l’absurdité de cette situation, un geste d’amour reste possible, un geste de tendresse qui vient réconforter.
Max van der Linden
La femme adultère
64 x 60 cm
« Dès le point du jour, Jésus revint au temple et comme tout le peuple venait à lui, il s’assit et se mit à les enseigner. Les scribes et les pharisiens amenèrent alors une femme qu’on avait surprise en adultère et ils la placèrent au milieu du groupe. « Maître, lui dirent-ils, cette femme a été prise en flagrant délit d’adultère. Dans la Loi, Moïse nous a prescrit de lapider ces femmes-là. Et toi, qu’en dis-tu ? » Ils parlaient ainsi dans l’intention de lui tendre un piège pour avoir de quoi l’accuser. Mais Jésus, se baissant, se mit à tracer du doigt des traits sur le sol. Comme ils continuaient à leur poser des questions, Jésus se redressa et leur dit : « Que celui d’entre vous qui n’a jamais péché lui jette la première pierre. » Et s’inclinant à nouveau, il se remit à tracer des traits sur le sol. Après avoir entendu ces paroles, ils se retirèrent l’un après l’autre, à commencer par les plus âgés, et Jésus resta seul. Comme la femme était toujours là, au milieu du cercle, Jésus se redressa et lui dit : « Femme, où sont-ils donc ? Personne ne t’a condamnée ? » Elle répondit : « Personne, Seigneur » et Jésus lui dit : « Moi non plus, je ne te condamne pas : va et désormais ne pèche plus. »
(Evangile de St Jean Chap.8)
Max van der Linden
La joie parfaite
58 x 78 cm
François et ses frères font route de Pérouse à Assise, le froid est intense et les fait souffrir. François demande à ses frères : « Quelle est pour vous, la joie parfaite ? » Et ils répondent tour à tour : « C’est connaître toutes les langues du monde…ou…On nous apporte beaucoup d’argent pour les pauvres…ou…Nous convertissons tous les infidèles. François répond : « Ce n’est pas cela la joie parfaite. Ecoutez : nous arrivons à Assise le soir, nous sommes tellement gelés que les glaçons qui pendent au bas de nos robes nous blessent les jambes. Nous frappons à la porte du couvent mais le portier n’ouvre pas, il nous traite de vauriens, nous jette des épluchures, il veut lâcher les chiens et nous rouer de coups. Si même en ces moments-là, nous pouvons rester unis dans l’affection, garder notre allégresse et notre patience, alors là, c’est la joie parfaite ».
Max van der Linden
La maison de Julos
105 x 70 cm
« Les maisons sont chargées à ras bord de bonheur et aussi de tristesse.
Max a fait le tour de la mienne et j’y vois une belle en allée dans sa robe longue et son chapeau et son sourire émerveillé.
« Je voudrais garder les yeux clairs et rieurs, dit-elle, longtemps, longtemps, longtemps. »
On aperçoit les deux petits mousses à l’avant du bateau,
des mousses qui sont aujourd’hui des marins à part entière
et qui ont traversé déjà presque toutes les mers,
celle de la nuit au long visage,
l’Atlantique, la Méditerranée, le Pacifique. Où s’arrête le voyageur ?
Garde-t-il sa maison toujours plantée dans sa mémoire ?
Le Max a mis les musiciens, le clavecin, la flûte,
tout ce qu’il faut pour faire un univers musical.
Moi-même, je suis là, avec la guitare, au premier étage de la maison :
cette salle de danse où la mort est déjà venue en visite.
« Quand le malheur entre dans la maison, il faut lui donner une chaise ! «
Les murs portent le secret, la belle en allée s’envole déjà vers ailleurs,
elle tire derrière elle le rideau et la maison survit avec ses secrets étranges,
elle ne veut pas être hantée, elle se hisse vers le soleil, ses fenêtres
sont des bouches pour goûter la lumière.
Rien n’est perdu, tout est à faire.
Sans doute ne suis-je qu’un chanteur naïf
A l’instar de ces voyageurs du regard,
de ces céramistes qui fixent le réel et le surréel et donnent sa vraie carrure à l’infinitude.
Julos Beaucarne
A Notre-Dame du Rond-Chêne
40 x 95 cm
Tout au bout du village de Tourinnes, dans une mer de blé, « A Notre-Dame du Rond Chêne » fut une chapelle de léproserie. Hortense y allait chaque soir dire l’Ave Maria
J’ai inscrit le texte de cette prière, en wallon.
Max van der Linden
Concerto pour quatre clavecins
90 x 40 cm
Je voudrais trouver les plus beaux mots du monde pour remercier Jean-Sébastien de tout ce que je lui dois, pour tout ce que fait vibrer en nous sa musique écrite il y a deux siècles.
Je voudrais lui rendre le plus bel hommage qui soit parce que je crois vraiment que, s’il n’avait pas existé, il manquerait quelque chose aux plus belles pages de l’histoire des hommes.
Il m’arrive en traversant la ville d’écouter sa musique dans ma voiture : elle transfigure les paysages les plus ternes.
Au milieu de la nuit, j’arrête parfois mon moteur en pleine campagne et j’écoute la messe en si : elle semble rejoindre les étoiles.
Max van der Linden
La Tour de Babel
230 x 80 cm
Pour moi, c’est la montée au bonheur et, tout en haut, c’est le paradis ; un paradis avec des gratte-ciel, des églises, des mosquées. Un paradis qu’on s’imagine tous à sa façon.
C’est la montée où on est tous ensemble ; l’évêque côtoyant le soldat, la femme frivole à côté du peintre, un officier de marine avec un Japonais, tout le monde.
Cette montée vers le bonheur est pour moi une chose essentielle et probablement la preuve la plus forte de l’existence de Dieu, cette soif du bonheur que l’on ne trouve jamais, si ce n’est par instants fugitifs, mais auquel on croit et on aspire tous.
Max van der Linden
Le préau
60 x 45 cm
Chaque jour – deux fois une demi-heure – le prisonnier « au secret » vient tourner dans ce morceau de cour.
Il peut, à travers le grillage, deviner un peu de ciel bleu.
Max van der Linden
Cantate dans un violoncelle
110 x 45 cm
La musique tient une grande place dans ma vie. Mon violoncelle reste pour moi un compagnon bien-aimé. J’en joue encore, à la demande, aux mariages, aux funérailles ou en pleine nuit parfois, quand tout est calme. Mes instruments furent souvent de pieuse mémoire : incendies, chutes en vélo ou piétinement d’un cheval entré de nuit par la fenêtre de mon atelier. Alors, je farcissais de céramiques mon violoncelle éventré.
Max van der Linden
François et le Sultan
110 x 45 cm
Ecœuré par la cruauté des Croisés, François traverse les lignes ennemies et va trouver le Sultan du Maroc qui le comble de dons et fraternise avec lui cordialement.
Max van der Linden
Mes amis musiciens
110 x 280 cm
Ils ont envahi le château d’Archennes. Sous le porche d’entrée(de gauche à droite) : Vivaldi, J.S Bach, Mendelssohn, Haendel, Beethoven. Derrière eux : Chopin, Schubert et Liszt . Dans le fond : Robert et Clara Schuman, Monteverdi et Brahms. Sainte Cécile joue de l’orgue à l’entrée du château, entourée d’anges musiciens et d’instrumentistes divers.
Dans la partie droite de la cour : un quintette à clavier, un groupe de moines chante du grégorien, la chorale d’enfants « les Mirlitons », Barbara Hendrix, Edith Martens à l’accordéon, une japonaise….
Dans la partie gauche : un rallye de cors de chasse et une fanfare. Raphaël joue du tambour, tandis que sous le parasol, la Reine Elisabeth converse avec Gabriel Fauré, Ravel et Debussy. Un orchestre arabe et une harpiste.
Au pignon de gauche, la chorale des Concerts de Tourinnes-la-Grosse et Feuillen Simon. Des jeunes occupent le grenier.
Au pignon de droite, des amis luthiers Edouard et Cocito. Jean Cremers est à l’orgue.
Max van der Linden
Festival Mozart
Aux orgues de l’abbaye Saint Pierre de Salzbourg, Mozart dirige la messe en do mineur, dont sa femme Constance chante les solos de soprano.
A gauche, l’enfant prodige quitte à 4 ans la maison de Salzbourg entre son frère et sa sœur pour être exhibé dans les cours d’Europe comme un chien savant. Plus tard il est au service de Colloredo, archevêque de Salzbourg qui le traite comme un domestique.
A droite, les opéras : Noces de Figaro, Flûte enchantée, Don Juan.
En dessous, la dérision de l’enterrement qui s’en va sous la neige vers la fosse commune. Requiem.
Ce que j’ai voulu faire dans mon « festival Mozart » ?
C’est un vieux projet : celui de faire une chose débordante, lumineuse comme sa musique et comme une église baroque, avec des ors et beaucoup de vie à chaque étage.
Mais cependant ce chant est en mineur comme le kyrie de la messe en do (panneau central) qui est une des choses les plus bouleversantes que j’ai entendues. Sous le pourpoint brodé de Mozart et sous le jaillissement de ses notes, il y a quelque chose de triste souvent, d’angoissé. Il faut lire attentivement ses lettres….
Et tout cela : les noces de Figaro et la Flûte enchantée, et la griserie du petit garçon phénomène, et l’éclatement des grandes-orgues de Salzbourg ; tout cela se dissipe à la suite du corbillard des pauvres où Mozart s’en va seul sous la neige, sans messe, sans amis, suivi peut-être de son seul chien, vers la fosse commune.
Et pourtant, il y a la joie qui est la plus forte….
Max van der Linden